Changement d’adresse web pour échapper à la justice, site bloqué par les fournisseurs d’accès dans l’attente d’une décision judiciaire, piratage des ordinateurs des utilisateurs pour miner de la crypto-monnaie : l’actualité récente confirme que l’âge d’or des sites de torrent, cette méthode illégale de téléchargement de contenus, est définitivement révolue. C’est notamment le cas de l’un des plus populaires d’entre eux, The Pirate Bay.
L’ère de l’impunité est en train de se refermer, progressivement. Les sites permettant de télécharger illégalement des contenus, notamment audiovisuel, sont dans l’oeil du cyclone – qu’il s’agisse de site offrant directement des liens vers des serveurs hébergeant les œuvres (comme le faisait Zone-telechargement) ou des sites « de torrent », qui diffusent des trackers permettant aux internautes de télécharger ces contenus sur les ordinateurs d’autres particuliers connectés (via le P2P).
Les sites de torrent fragilisent la culture mondiale, notamment française
La fermeté des autorités se comprend : rien qu’en France, le piratage audiovisuel prive le secteur audiovisuel d’environ 15% de ses revenus, soit environ 2 000 emplois qui ne voient pas le jour, et met en danger les spécificités culturelles françaises.
Récemment, le site de torrent The Pirate Bay, un des mastodontes de ce marché illégal, s’est retrouvé doublement au cœur de l’actualité. D’abord par la révélation d’une pratique plus que douteuse : des utilisateurs de The Pirate Bay avaient constaté que leur processeur ralentissait en visitant certaines pages du site.
Un module pour que l’utilisateur mine du BitCoin à son insu, au profit de The Pirate Bay !
Après enquête de chercheurs en cybersécurité, il s’est avéré que The Pirate Bay avait installé sur ces pages un module JavaScript permettant d’utiliser le processeur du visiteur pour… miner du BitCoin, au profit du site de piratage !
Rappelons que les crypto-monnaies comme BitCoin fonctionnent sur un principe de multi-validation des transactions par un nombre donné d’utilisateurs afin qu’ils soient inscrits sur la blockchain de la monnaie : cette validation nécessite d’y dédier de la puissance de calcul, que la crypto-monnaie rémunère – c’est ce qu’on appelle le « minage » de crypto-monnaie, comme BitCoin.
The Pirate Bay a certes précisé qu’il ne s’agissait que d’un test, limité à certaines pages du site, et n’utilisant qu’un faible partie des ressources du visiteur. Mais le fait demeure : le site de torrent semble déterminé à trouver de nouvelles sources de revenus, et est prêt, pour cela, à utiliser les ressources système des visiteurs pour miner de la crypto-monnaie, sans demander leur accord ! Les utilisateurs, en plus d’être ouvertement dans l’illégalité, faisaient à leur insu travailler leur ordinateur au profit d’un site de piratage…
Changement de nom de domaine : une fuite en avant devant la justice
Autre actualité, cette fois du coté des Pays-Bas, où un tribunal vient de rendre une décision aussi forte de sens qu’inédite. En pleine enquête sur le site dans l’objectif de le faire fermer ou d’en limiter l’accès, le Cour Suprême a décidé, dans l’attente d’une décision durable, de suspendre l’accès à ce site dans le Pays.
Jusqu’en 2014, les Pays-Bas bloquaient les adresses IP ou les URL des sites qu’ils voulaient interdire, mais la méthode était trop simple à contourner. Pour preuve, The Pirate Bay a très régulièrement changé de nom de domaine, tout comme vient de le faire un de ses concurrents dans le piratage, Torrent9 : le site, qui utilisait voici peu le domaine national du Montenegro (.me) puis celui des îles Coco, vient de passer ces jours-ci sur l’extension assignée au Pérou (.pe). Le but est clairement d’échapper à une saisie de nom de domaine ou de prévenir une mesure de blocage.
Une solution radicale, venue des Pays-Bas : couper l’accès aux sites auprès des FAI
Conscient des limites de cette méthode, les Pays-Bas ont décidé de bloquer l’accès à la source. Le tribunal a tout simplement demandé aux deux principaux fournisseurs d’accès à Internet (FAI) du pays de couper les accès à The Pirate Bay dans les 10 jours à venir, sous peine de lourdes amendes.
Cela signifie que tout utilisateur de ces FAI ne pourra plus accéder à The Pirate Bay, ce qui revient à limiter drastiquement son influence aux Pays-Bas. Cette solution est radicale, et surtout bien plus rapide qu’une longue enquête permettant de fermer le site, comme pour T411. De quoi inspirer d’autres pays ?