Conscient que lutter contre l’optimisation fiscale des géants du net risque prendre du temps, le ministre de l’économie Bruno Le Maire annonce une future taxe européenne sur le chiffre d’affaire des GAFA. Une première riposte des services fiscaux de l’Union Européenne.
Au départ un constat : les géants du net, ou GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon), pratiquent massivement l’évasion fiscale dans l’Union Européenne. Une technique classique : choisir une filiale principale en Europe, l’installer dans un pays à la fiscalité avantageuse, et faire déclarer une majorité des bénéfices de la société à cette filiale. Le chiffre d’affaire réalisé en France par Amazon, par exemple, se retrouve, pour sa plus grande part, taxé au Luxembourg.
« La France est à la pointe de cette bataille »
Ainsi, sur les trois années fiscales 2013, 2014 et 2015, un rapport de l’eurodéputé Paul Tang estime que ces techniques d’optimisation fiscale ont permis à Google et Facebook d’éviter 5,4 milliards d’euros d’impôt dans l’Union Européenne !
Un état de fait contre lequel plusieurs pays européens sont entrés en guerre, notamment l’Allemagne et la France : « Depuis septembre 2017, la France est à la pointe de cette bataille pour que les Gafa paient leurs impôts au niveau approprié. Les concurrences nouvelles peuvent être bénéfiques à condition d’être loyales » rappelle le ministre de l’économie Bruno Le Maire.
Une taxe sur le chiffre d’affaire en attendant un changement de règles fiscales
L’objectif à terme demeure, pour une majorité de gouvernements de l’Union, de faire évoluer les règles de l’impôt sur les sociétés afin d’empêcher ces tours de passe-passe et de pouvoir imposer les GAFA dans les pays où ils sont actifs, et non dans un paradis fiscal. Mais cette évolution risque de prendre très longtemps. Si bien que le gouvernement français milite, depuis plusieurs mois, pour la mise en place d’une autre mesure, immédiatement applicable.
Cette mesure vient d’être révélée par Bruno Le Maire au Journal du Dimanche : « Une directive européenne sera dévoilée dans les semaines qui viennent, révèle le ministre. Elle marquera une avancée considérable ». Et quelle sera la nature de cette avancée ? Le Ministre de l’économie ne joue pas sur le suspens et le précise : une taxe sur le chiffre d’affaire réalisé par les GAFA dans chaque pays de l’Union.
Un taux modeste, pour être applicable immédiatement
Concernant le taux de cette taxe, Bruno Le Maire explique que « la fourchette va de 2 % à 6 % : on sera plus près de 2 que de 6 ». Le Ministre préfère mettre en place une mesure raisonnable, pour ne pas brusquer les grands groupes de la Tech mondiale, qui sont justement, à l’image d’Amazon, en train d’investir massivement en France !
Pour autant Bruno Le Maire semble déterminé à utiliser cette nouvelle mesure pour mettre, progressivement, une pression de plus en plus élevée sur les GAFA : « C’est un point de départ. Je préfère un texte applicable très vite plutôt que des négociations interminables. On l’améliorera par la suite ».
Mettre la pression sur les dirigeants des GAFA
Le message semble limpide : mettre en place une taxe modeste, immédiatement, en faisant comprendre aux géants du net qu’elle pourrait être augmentée fortement. Un moyen de les pousser à renoncer d’eux-mêmes à leurs techniques d’évasion fiscale ?
Bruno Le Maire semble compter sur leur bon sens, une fois dos au mur : « Les dirigeants des GAFA eux-mêmes comprennent que le système n’est pas tenable », a-t-il précisé. Il ira bientôt prêcher cette bonne parole en Californie. Bientôt la fin des privilèges fiscaux pour les géants du net ?