La Côte d’Ivoire se rêve en « start-up nation de l’Afrique ». Un objectif ambitieux qui ne surprendra pas ceux qui suivent, ces dernières années, l’évolution du paysage numérique ivoirien.
Attention, une plateforme numérique peut en cacher d’autres ! La start-up ivoirienne Janngo vient de réaliser sa première levée de fonds d’un montant d’1 million d’euros auprès d’un pool d’investisseurs, notamment la banque d’investissement Clipperton et la firme française Soeximex.
Il s’agit d’une excellente nouvelle pour Janngo, mais pas seulement. Premier start-up studio à impact social en Afrique, la plateforme ivoirienne a pour objectif la création, le développement et le financement d’autres plateformes numériques. Ainsi, les ressources recueillis permettront à Janngo de développer de nouvelles plateformes numériques, en particulier africaines, et d’ouvrir des bureaux à Abidjan et à Paris. « Nous voulons autonomiser les PME africaines en tirant parti de la technologie. Nous construisons des solutions pour soutenir leur croissance, renforcer leurs capacités et leur compétitivité », a expliqué à l’agence Ecofin Fatoumata Bâ, fondatrice et PDG de Janngo. On l’aura compris, en faisant confiance à la plateforme ivoirienne, c’est toute l’économie numérique africaine que les investisseurs ont choisi de booster.
Il faut dire que la montée en puissance du numérique est manifeste sur le continent en général et en Côte d’Ivoire en particulier. Les 100 000 visiteurs du salon VivaTech 2018, qui s’est tenu du 24 au 26 mai à Paris, ont eu l’occasion de le constater. Conviée à une session d’échange et de créativité sur les enjeux de l’entrepreneuriat en Afrique, la start-up Lifi-Led Côte d’Ivoire en a profité pour montrer ce qu’elle sait faire de mieux : éclairer et inspirer.
Le numérique décolle
Lifi-Led CI est en effet la première entreprise africaine spécialisée dans l’intégration de solutions Lifi, d’éclairage intelligent de contenu dynamique et de support de communication digital. « Notre solution Lifi permet une économie de plus de 80 % de la consommation d’éclairage. De plus, elle transforme les coûts d’éclairage en un nouveau support de communication ouvert à toutes sortes d’applications », a déclaré Ange Frédérick Balma, PDG de la société.
Loin d’être des cas isolés, Janngo et Lifi-Led prouvent que le numérique décolle en Côte d’Ivoire. Selon le gouvernement ivoirien, le secteur des TIC représente entre 7 et 8 % du PIB du pays, et devrait atteindre 15 % en 2020. Il génère 300 à 400 milliards de F CFA par an et représente environ 13 % des recettes fiscales.
Mieux : le secteur des TIC est en train de transformer radicalement l’économie du pays. Si auparavant l’agriculture dominait l’économie, le tertiaire représente aujourd’hui plus de 45 % du PIB ivoirien, contre 35 % pour le secteur primaire, selon Jean-Baptiste Djohy, consultant à l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA). Or, « cela est dû en grande partie au développement du secteur du numérique et de ses effets d’entraînement dans les autres sous-secteurs en Côte d’Ivoire depuis la fin de la crise politique, en 2011 », explique l’expert.
Création d’emplois
Le « boom » du numérique ivoirien ne doit rien au hasard, mais répond à une stratégie clairement énoncée par le gouvernement. Le pays se voit en effet comme la future « start-up nation » de l’Afrique. « L’essor de l’économie numérique, c’est la quatrième révolution, celle qui va connecter les habitants. La Côte d’Ivoire ne pouvait pas rester en marge », expliquait en novembre Bruno Koné, ministre de l’Économie numérique.
Il parle en connaissance de cause. C’est en effet sous son autorité que les douanes, les finances ou encore l’éducation nationale ont été numérisées. La création de l’Université virtuelle de Côte d’Ivoire, la mise en place du guichet unique dans le foncier urbain, la distribution de cartes de santé et de carnets de vaccination numériques individuels, la création de la Fondation Jeunesse numérique en 2016, c’est aussi lui. « L’économie numérique peut nous aider à nous développer plus rapidement, à créer des emplois, réduire les coûts et mieux gouverner », s’enthousiasme celui qui voit dans le numérique le meilleur outil pour lutter contre le chômage des jeunes.
Certes, un long chemin reste à parcourir et de nombreuses start-up devraient encore voir le jour compte tenu du niveau de développement du pays dans la région. Mais le gouvernement ivoirien l’a rappelé lors du 5e Sommet Union africaine-Union européenne, les 29 et 30 novembre derniers à Abidjan : le numérique devra « impacter durablement la croissance économique, changer en profondeur le fonctionnement de l’économie sociale et créer les fondements pour une économie du savoir ». Nous voilà prévenus.