Lancé en 2016, le plan de digitalisation de l’administration marocaine est en train de porter ses fruits. L’objectif, d’ici 2020, étant de faire du royaume l’un des grands hubs numériques d’Afrique et du Moyen-Orient.
L’administration marocaine n’échappe pas à l’ère du temps numérique. Comme de très nombreux services étatiques aux quatre coins de la planète, ceux du royaume chérifien ont commencé leur mue digitale. Le plan gouvernemental dévolu, intitulé « Maroc numérique 2020 », vise à modifier en profondeur les processus administratifs afin de les rendre plus efficients et, à terme, faire du pays un hub numérique régional. Les autorités marocaines ont, à ce titre, mis la barre très haut, puisqu’elles visent le « Top 3 » des pays les plus performants de la zone Moyen-Orient/Afrique en la matière.
Abandon du papier
La transformation digitale de l’administration au Maroc était d’ailleurs au centre des débats, lors d’un séminaire organisé à Rabat, la capitale, en avril dernier. Où les différents services de l’Etat – plusieurs représentants ministériels étaient présents – ont pu présenter leurs outils numériques destinés à faciliter le travail des fonctionnaires. Mais également les relations entre administrés et administration, ainsi qu’entre services administratifs eux-mêmes. Le « e-gouvernement » à la marocaine sera effectivement basé sur l’intégration et l’interopérabilité des principaux systèmes d’information de l’Etat.
Bien loin, en tout cas, des objectifs frileux du plan numérique précédent, établi en 2013 et abandonné quasiment aussitôt. Il s’agissait alors de consolider des services informatiques existants, sans réellement rechercher tous les avantages liés à leur digitalisation. L’exemple de la Caisse de dépôt et de gestion (CDG) illustre parfaitement le virage opéré en 5 ans. Jusqu’à présent, l’institution financière avait massivement recours aux documents papiers ; à partir d’octobre prochain, elle sera dotée d’une Web radio ainsi que d’une Web TV à des fins pédagogiques, et tous ses services seront digitalisés. Et, surtout, sécurisés.
La CDG a effectivement choisi une solution développée par l’entreprise française DiliTrust, spécialisée depuis 20 ans dans l’édition et l’intégration de logiciels. Les données de l’institution financière – chargée de récolter l’épargne privée des Marocains afin de la dispatcher vers des investissements rentables –, souvent sensibles et confidentielles, pourront être échangées sans problème. Quant à ses réunions et autres conseils d’administration – ceux de ses filiales également –, ils seront intégralement digitalisés. Ce qui représente tout de même quelque 200 instances qui, à terme, abandonneront pour de bon le papier.
Lutte contre le commerce illicite
En plus des économies – de temps et d’argent – permises par la digitalisation des services administratifs marocains, le gouvernement attend de celle-ci qu’elle réduise le manque à gagner lié au commerce illicite, qui s’élève à 170 milliards de dirhams (environ 15 milliards d’euros) dans le royaume. Comment ? En améliorant la qualité du travail de l’Administration des douanes et impôts directs (ADII), grâce aux nouvelles technologies. Comme, notamment, le Système automatisé de marquage intégré en douane (SAMID), développé par l’entreprise suisse SICPA, permettant d’augmenter le niveau de perception des recettes liées au droit d’accise.
Les résultats, d’ailleurs, sont déjà là. En 2017, l’ensemble des droits et taxes perçus par l’ADII a progressé de 5,1 %, frôlant les 100 milliards de dirhams ; les douanes ont également saisi pour près de 560 milliards de dirhams de marchandises contrefaites, soit 15 % de plus qu’en 2016. Le marché illicite de cigarettes, surtout, a fortement pâli ces dernières années, puisque la taxe intérieure de consommation (TIC) a rapporté, grâce au système de traçabilité mis en place, près de 10,5 milliards de dirhams l’an dernier, contre 9,9 milliards de dirhams en 2016. Une aubaine pour le gouvernement, qui cherche à relancer l’économie du pays.
Outre les gains pécuniaires, l’administration fiscale a également fortement amélioré sa relation avec l’usager. Le directeur général des impôts, Omar Faraj, l’avait assuré l’an dernier : « Au 1er janvier 2018, nul contribuable […] ne sera dans l’obligation de se déplacer à l’administration fiscale pour réaliser ses transactions ou obtenir une quelconque attestation ». Mieux : grâce à la dématérialisation du service, celui-ci sera facilité, davantage réactif et les délais de restitution seront raccourcis. De quoi éviter à de nombreux Marocains de s’arracher les cheveux devant les (anciennes) lenteurs de l’administration.