Le ministre de l’économie Bruno Le Maire souhaite que la France encourage fortement l’implantation de datacenters sur le sol national. Pour des raisons économiques, mais aussi de gouvernance et de souveraineté, il ambitionne faire de la France « la première terre d’accueil de datacenters » d’Europe.
Si la French Tech et l’innovation française se portent plutôt bien, la France est clairement à la traîne en matière de stockage des données. L’Hexagone n’est que le quatrième hébergeurs de datacenters d’Europe, derrière les deux géants des nouvelles technologies, l’Allemagne et le Royaume-Uni, mais aussi les Pays-Bas.
Attirer des datacenters pour des raisons économiques
Une situation que veut résolument changer le ministre de l’économie, Bruno Le Maire. Durant l’inauguration d’un datacenter d’Equinix, à Pantin, en Seine-Saint-Denis, il a tenu un discours ambitieux sur le sujet. La France doit, selon lui, devenir « la première terre d’accueil de datacenters » d’Europe.
L’hébergement de données est en effet un secteur en pleine explosion, créateur de richesse et d’emplois. Le datacenter que Bruno Le Maire inaugurait représente à lui seul 100 millions d’euros d’investissement, et des emplois créés. Equinix a d’ailleurs déjà investi plus d’un milliard d’euros en France. Multiplier les datacenters comme celui-là ne pourrait que faire du bien à l’économie du pays.
« Pas de souveraineté politique sans souveraineté technologique »
Mais au-delà de ces légitimes considérations, cette volonté gouvernementale est avant tout une question de gouvernance : « il n’y a pas de souveraineté politique sans souveraineté technologique » insiste le ministre.
« La première condition de notre souveraineté numérique et de cette protection, c’est d’avoir une capacité d’hébergement de données satisfaisante sur notre sol, et cette capacité d’hébergement de données va devenir de plus en plus cruciale à mesure que va se développer cette révolution industrielle » détaille encore Bruno Le Maire.
La France, un eldorado pour les datacenters ?
Et, pour attirer ces opérateurs de datacenters, Bruno Le Maire met en avant l’attractivité française. Le pays possède en effet de nombreux atouts, qu’il n’a pas su assez bien valoriser jusqu’ici : « un réseau électrique très fiable, une électricité disponible à un des prix les plus compétitifs, décarbonée à 95% et un des meilleurs réseaux télécoms européens » liste le ministre.
Et, pour provoquer un effet d’appel, il évoque une mesure fiscale incitative. Le gouvernement propose désormais aux opérateurs de datacenters « un taux réduit de taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité « , à condition qu’ils fassent des efforts démontrables d’efficacité énergétique.
Muscler le RGPD
Mais le ministre voit encore plus loin et plus large. Pour lui, il faut encore muscler le cadre juridique national et européen de gestion des données, et compléter le RGPD, notamment pour pouvoir se défendre contre les éventuels abus du Cloud Act.
« Nous travaillons à un dispositif de protection des données stratégiques de nos entreprises, pour que leurs données ne puissent pas être récupérées par l’administration ou par la justice américaine, sans que ces entreprises ne soient averties » expose Bruno Le Maire, toujours combatif quand il s’agit de faire face aux GAFA et aux Etats-Unis.
Porter la France aux avants-postes
Au-delà, le ministre a réaffirmé la volonté gouvernementale de porter la France aux avants-postes sur la quatrième révolution industrielle : « La France n’a pas vocation à rester en arrière. Elle doit, au contraire, prendre à bras le corps cette révolution technologique de l’intelligence artificielle et se donner les moyens de réussir dans tous les aspects de cette révolution. Il y a les données, leur stockage, leur utilisation, leur gestion, leur valorisation ».
Le seul problème est que la France, et même l’Union Européenne dans son ensemble, font face à des entreprises, essentiellement américaines et chinoises, qui s’appuient sur la captation de données, la vente de produits et/ou de service à échelle mondiale, une des activités les plus lucratives qui soient. Ces entreprises ont développé des revenus et des capacités d’investissement colossales.
Subventions publiques et implications des grands groupes internationaux
La France et l’Union Européenne ne peuvent soutenir la comparaison qu’avec de larges subventions publiques, et une implication de groupes français ou européen de dimension mondiale, qu’ils soient directement impliqués ou non dans les technologies numériques.
Le ministre le sait. Aura-t-il le pouvoir et les moyens de le faire ? Difficile à dire. Attirer plus de datacenters en France est un bon début. Mais qui ne suffira jamais a faire de la France un leader mondial de cette quatrième révolution industrielle.