Annoncée depuis le début de la mandature comme l’une des lois phares du gouvernement, le texte de la Loi Audiovisuel a été présenté ce jeudi 5 décembre 2019 devant l’Assemblée Nationale. Sur le front du piratage, les trois mesures phares sont la fusion de la HADOPI et du CSA, une réactivité accrue contre les sites miroir et une extension du droit d’auteur aux rencontres sportives. De quoi répondre aux nouveaux visages du piratage en 2020 ?
Depuis l’élection d’Emmanuel Macron à la présidence de la République, le gouvernement annonce que la future Loi Audiovisuel va enfin doter la France d’un arsenal efficace contre le piratage audiovisuel, en particulier contre le streaming et le téléchargement direct, que la riposte graduée de la HADOPI ignorait.
Loi Audiovisuel : HADOPI et CSA fusionnent pour former l’ARCOM
Le texte de cette loi vient d’être présenté par le ministre de la Culture, Franck Riester, à l’Assemblée Nationale. Les débats débuteront en février 2020, pour une procédure dite accélérée : le texte ne sera examiné qu’une fois par le Sénat et l’Assemblée Nationale. Il devrait donc être publié prestement.
Comme annoncé, la HADOPI et le CSA vont (enfin) fusionner. La nouvelle entité s’appellera l’ARCOM, pour Autorité de Régulation de la Communication Audiovisuelle Numérique. Son objectif est de mettre à jour la régulation d’Internet, avec des outils enfin adapté à la réalité mouvante de ce média.
Lutte contre le piratage : pour plus de réactivité
Le texte donne ainsi des pouvoirs étendus à cette nouvelle entité, notamment sur le front du piratage. Les procédures administratives visant à déréférencer (auprès des moteurs de recherche) et bloquer (auprès des fournisseurs d’accès à Internet) les sites en France vont être simplifiées, pour plus de réactivité.
La loi veut également rendre pénalement responsables les sites qui se « contentent » de cumuler des liens vers des contenus illégaux, sans les héberger directement – ce qui n’est actuellement pas le cas.
Cible prioritaire : les sites miroir
Autre cible prioritaire de la loi : les sites miroir. Dès lors qu’une décision de justice a visé un site jugé illicite, l’ARCOM aura la possibilité de demander immédiatement son déréférencement ou son blocage, et pourra « exécuter de manière dynamique ladite décision judiciaire ».
Ainsi, agissant sur demande des ayant-droits lésés, l’ARCOM aura la possibilité d’étendre blocage et déréférencement aux sites miroirs, qui reproduisent le contenus du site bloqué mais sur une autre adresse qui n’est pas concerné par la décision de justice.
Envisagé depuis des années, une telle disposition devrait permettre de réduire au silence les sites miroirs. En effet, si les moteurs de recherche ou fournisseurs d’accès refusent d’obtempérer, l’ARCOM pourra se tourner vers l’autorité judiciaire, y compris en référé, pour faire cesser l’accès à ces contenus, par toute mesure appropriée.
Révolutionner la lutte contre le streaming sportif
Enfin, cette Loi Audiovisuel propose de révolutionner (là encore, enfin) la lutte contre le streaming sportif, en étendant le droit d’auteur aux rencontres sportives : cette disposition autoriserait une action beaucoup plus rapide contre les sites en question. Les juges pourraient dès lors faire fermer les sites soupçonnés de diffuser des rencontres en direct, presque en temps réel.
Cette procédure a été mise en place en début d’année 2019 au Portugal, par l’agence Mapinet, qui va collaborer avec l’ARCOM. Les résultats sont spectaculaires : « Depuis le 1er janvier 2019, nous pouvons bloquer des contenus en streaming, en temps réel. Nous l’avons fait pour douze matches de football, en bloquant 736 sites », détaille Carlos Eugénio, président de Mapinet.
Bloquer les sites en direct, ou presque
Si la loi est adoptée, un ayant-droit d’une rencontre diffusée à la télévision (donc la chaîne qui la diffuse) pourra « saisir le président du tribunal judiciaire, statuant au fond ou en référé afin de prévenir ou de remédier » à une atteinte à un droit exclusif ou à un accord d’exploitation d’une compétition ou manifestation sportive.
Le juge pourra alors trancher en procédure accélérée : quelques minutes à peine sont nécessaires, permettant de couper les flux de streaming illégaux en direct. Avec un effet de douche froide rédhibitoire pour l’internaute, frustré de devoir trouver un nouveau lien de streaming, qui sera peut-être lui aussi coupé.
Au Portugal, le piratage des rencontres sportives a spectaculairement reculé suite à l’adoption de cette mesure. Rendez-vous en février, 2020, pour voir ce qu’ajouteront et soustrairont à cette loi les débats parlementaires.