Pour faire face à la pénurie de semi-conducteurs qui touche l’économie mondiale et ralentit la production industrielle de nombreux secteurs, plusieurs acteurs de premier plan viennent d’annoncer des investissements majeurs. Le plan de relance américain de Joe Biden contient ainsi un volent de 50 milliards de dollars consacré aux semi-conducteurs. Du coté des fondeurs, TSMC, numéro 1 mondial du secteur, a annoncé 100 milliards d’investissements sur 3 ans, et Intel vient de débloquer 20 milliards de dollars. La Commission Européenne milite quant à elle pour un renforcement de la filière européenne des puces électroniques ; elle pourrait recevoir le soutien de TSMC et Samsung.
La pénurie de semi-conducteurs continue de frapper durement l’industrie mondiale, en particulier aux Etats-Unis et en Europe, notamment dans des secteurs-clés comme l’automobile. De nombreuses usines tournent actuellement au ralenti, provoquant une vaste prise de conscience mondiale de l’importance stratégique de ces composants-clés.
Joe Biden veut débloquer 50 milliards de dollars pour soutenir les puces américaines
Du coté des gouvernements, Joe Biden vient d’inclure dans son plan de relance à 2 000 milliards une enveloppe de 50 milliards de dollars (43 milliards d’euros) pour soutenir l’industrie américaine des semi-conducteurs, qui fait suite à une première aide, fin 2020, de 22,8 milliards de dollars (19,3 milliards d’euros). Le champion américain des puces, Intel, a d’ailleurs annoncé, plus tôt dans l’année, sa volonté de mettre 20 milliards (17 milliards d’euros) sur la table pour augmenter ses capacités de production.
Le budget débloqué par le plan de relance va permettre de soutenir la production de semi-conducteurs, pour garantir une remontée en volume des puces made in America (les Etats-Unis ont perdu 25% de parts de marché dans ce secteurs depuis les années 1990), mais aussi la recherche et la création, pour conserver un contrôle technologique sur les puces les plus avancées, notamment face à la concurrence chinoise.
Rappelons en effet que l’industrie chinoise ne dispose d’aucun fondeur capable de graver des puces en 7 nanomètres – une technologie que maîtrisent uniquement Intel, le coréen Samsung, et le numéro 1 du secteur, le taïwanais TSMC.
TSMC met 100 milliards sur la table pour 3 ans
TSMC a justement annoncé sa volonté d’augmenter sa capacité de fabrication de semi-conducteurs, via des investissements massifs. En début d’année, le géant taïwanais envisageait de mettre 28 milliards de dollars (23,7 milliards d’euros) sur la table. Mais ces prévisions viennent d’être revues (largement) à la hausse.
« Nous prévoyons d’investir 100 milliards de dollars (85 milliards d’euros) au cours des trois prochaines années afin d’augmenter notre capacité à soutenir la fabrication et la R&D des technologies avancées de semi-conducteurs. Nous travaillons en étroite collaboration avec nos clients pour répondre à leurs besoins de manière durable et tout faire pour les aider dans cette situation de pénurie », a ainsi déclaré TSMC dans un communiqué.
Diplomatie et haute technologie
TSMC est au cœur d’un jeu mêlant haute technologie et diplomatie. C’est en effet la plus grande entreprise taïwanaise, et elle fournit en puce des géants américains de la tech comme Apple, Qualcomm ou Nvidia, mais aussi de nombreux constructeurs automobiles de premier plan. Or, Taïwan craint terriblement une offensive de la Chine pour reprendre le contrôle d’un territoire que Pékin continue de considérer comme lui appartenant. TSMC est ainsi une pièce maîtresse de Taïwan pour s’assurer la fidélité de ses alliés.
TSMC et Samsung ont d’ailleurs récemment proposé à l’Union Européenne de l’aider à mettre en place une industrie de gravures de semi-conducteurs inférieurs à 10 nm. Les ambitions européennes en la matière sont en effet importantes.
L’Union Européenne à la relance sur les semi-conducteurs ?
Alors que l’Union Européenne ne produit que 10% des puces mondiales, la Commission Européenne a remis aux législateurs européens, le 9 mars 2021, un document raccord avec sa volonté d’affirmer sa souveraineté numérique : « nous proposons un niveau d’ambition tel que, d’ici à 2030, la production de semi-conducteurs de pointe et durables en Europe, y compris les processeurs, représente au moins 20% de la production mondiale en valeur », y expose la Commission.
« Face aux tensions croissantes entre les États-Unis et la Chine, l’Europe ne sera pas un simple spectateur, et encore moins un champ de bataille. Il est temps de prendre notre destin en main. Cela implique évidemment d’identifier et d’investir dans les technologies numériques, dont les semi-conducteurs, qui permettront d’appuyer notre souveraineté et notre avenir industriel », avait précisé Thierry Breton, commissaire européen chargé du marché intérieur.