Ce 15 juin 2021, Huawei a annoncé avoir souscrit pour 8 millions d’euros d’obligations convertibles de Qwant, le moteur de recherche français, qui peine à devenir rentable. Ce rapprochement du géant chinois, toujours privé des services de Google, avec une société soutenue par le gouvernement franaçs pose néanmoins de réelles questions stratégiques…
Sur le papier, il s’agit d’un véritable deal gagnant-gagnant. D’un coté Qwant, un moteur de recherche français, champion de la vie privée, aux hautes ambitions – être l’un des fers de lance de la révolte logicielle anti-Google –, mais embourbé dans une situation financière plus que fragile, et encore marqué par le scandale qui a vu le départ de son président historique, Eric Léandri, début 2020.
Qwant a besoin de cash, Huawei a besoin d’un bon moteur de recherche en Europe
Pour l’instant, Qwant reste largement déficitaire, malgré le coup de pouce du gouvernement français, qui en a fait son moteur de recherche par défaut. La société a encore perdu 13 millions d’euros en 2020, pour un chiffre d’affaire de 7,5 millions d’euros.
De l’autre coté Huawei, le fabriquant chinois, frappé de plein fouet par les sanctions des Etats-Unis, et privé des services de Google, qui a fait de Qwant le moteur de recherche par défaut de ses appareils (smartphone, tablettes, PC…). Le groupe chinois a d’ailleurs cédé sa filiale Honor, dédiée aux smartphones, à un consortium chinois, pour libérer la marque des sanctions américaines.
Pour se maintenir en Europe, Huawei a tout intérêt à ce que Qwant se développe et réussisse son expansion sur le Vieux Continent. Pour assurer ce développement, Qwant a besoin d’argent. Huawei lui en apporte donc, en souscrivant, ce 15 juin 2021, à 8 millions d’euros d’obligations convertibles.
Avec les obligations convertibles, Huawei pourrait devenir actionnaire d’un vecteur de souveraineté numérique pour la France…
Le principe de ces obligations ? Il s’agit de prêts à taux très bas, mais qui peuvent être transformées par l’investisseur en actions de l’entreprise. A mi-chemin entre le prêt bancaire et la levée de fonds, donc. Reste qu’avec ce deal, Huawei met un pied dans la porte de Qwant.
L’entreprise chinoise, accusée d’espionner pour le compte de son gouvernement (au point que ses équipements sur la 5G ont été boycottés un peu partout en Occident), pourraient donc devenir actionnaire d’un moteur de recherche qui ambitionne d’être la tête de pont de la souveraineté numérique de la France et de l’Union Européenne. Vous y voyez un (petit) paradoxe ? Vous n’êtes assurément pas les seuls…