Enterrant définitivement FLoC, son ciblage publicitaire par cohortes, Google sort un nouveau projet de sa manche pour développer une forme de publicité ciblée, mais sans cookies publicitaires : baptisé Topics, il s’agit d’un système de « Thèmes », définis par les habitudes de navigation d’un internaute, mais sur lesquels il aurait la main. Le projet semble a priori dans les clous du RGPD. Déploiement espéré pour fin 2022.
Same player shoots again : Google vient de dégainer une nouvelle alternative possible aux cookies publicitaires, après l’échec cuisant des FLoC.
La publicité, au coeur du modèle économique de Google
Google a en effet annoncé en 2020 la fin des cookies publicitaires tiers sur Chrome d’ici 2023. Mais les revenus publicitaires demeurent l’alpha et l’omega du modèle économique de Google, ils représentent toujours 80 % de ses revenus en 2021, pour un bénéfice net de 76 milliards de dollars (en hausse de 89%).
Le géant du net cherche donc une nouvelle méthode pour continuer de cibler la publicité à destination de ses utilisateurs, sans créer des profils publicitaires uniques soutenus par ces cookies. Il a proposé, en 2021, un ciblage « par cohortes », baptisé FLoC, qui intégrait les internautes à des groupes de consommateurs ayant des goûts similaires.
FLoC enterré sans cérémonie
Navigateurs, moteurs de recherche, hébergeurs ont tiré à boulet rouge sur le projet, développant même des outils pour bloquer cette technologie, également critiquée par la Commission Européenne et divers organes de contrôle de la concurrence.
De toute évidence, Google a décidé de jeter l’éponge sur FLoC. Le géant du net vient en effet de présenter un nouveau dispositif, sans évoquer le moins du monde l’existence de FLoC, qui devrait finir sans regret dans les poubelles de l’oubli de la tech.
Topics, une API qui associe des « thèmes » aux internautes
Cette nouvelle technologie de ciblage s’appuie sur une API, baptisée Topics, et intégrée dans la Privacy Sandbox de Chrome, l’environnement dédié à la confidentialité et au ciblage dans lequel Google teste les alternatives aux cookies.
Le principe est simple : chaque profil d’utilisateur est associé à des « thèmes » (de un à trois), définis par les trois dernières semaines de navigation, et sur lesquels l’internaute aurait (en partie) la main.
Dans sa présentation du procédé, Google expose des idées de thèmes, comme « Automobile », « Livres », « Musique rock », « Football », « Films d’animation »… Evidemment, comme le précise Google, « les thèmes sont sélectionnés avec attention afin d’exclure les catégories potentiellement sensibles, telles que le genre ou l’appartenance ethnique ».
Un stockage limité à l’appareil de l’utilisateur
Ces thèmes, sélectionnés par les algorithmes de Google, seront « représentatifs des principaux centres d’intérêt des utilisateurs pour une semaine donnée », et supprimés au bout trois semaines, pour être remplacés par d’autres.
Pour résoudre la quadrature de la confidentialité et de la personnalisation publicitaire, Google a eu l’idée de stocker ces thèmes exclusivement sur les appareils des utilisateurs, et jamais sur des serveurs externes (y compris ceux de Google), mais de leur faire dialoguer, via l’API Topics, avec les sites et annonceurs partenaires, qui pourront donc proposer des publicités ciblées en fonction de ces centres d’intérêt.
Remettre l’internaute au centre du processus de ciblage
Google précise que les utilisateurs pourront visualiser les thèmes partagés, supprimer ceux qu’ils n’aiment pas, et même, selon Vinay Goel, le directeur produit pour la Privacy Sandbox, « désactiver entièrement la fonctionnalité ». Sur ce point, faisons confiance à Google : la suppression de Topics risque de nécessiter une quinzaine de fenêtre et demandes de confirmations…
Reste que, sur le papier, Topics semble respecter le RGPD et les principes de respect de la vie privée. Google ne stocke plus aucune donnée personnelle, le traitement a lieu directement sur les appareils de l’internaute, qui garde la main sur les thèmes, temporaires et supprimables.
Que nous cache Google ?
En résumé, l’idée est de laisser les algorithmes construire un profil grossier de l’internaute, de le laisser ce dernier l’accepter ou pas, et de cibler les publicités en fonction de ce profil. Passer d’un modèle opaque, où personne ne sait comment sont constitués les profils publicitaires, à un modèle ouvert, lisible, et maîtrisable ?
Le procédé ne ressemble pas vraiment aux habitudes de Google. Mais le géant du net a peut-être compris que le vent avait tourné et que l’heure était venue de repenser son modèle. Peut-être dispose-t-il aussi d’assez de données via Chrome, Google.com ou YouTube pour constituer des profils précis des utilisateurs Google sans avoir besoin d’y ajouter des cookies.
Quoiqu’il en soit, des expérimentations vont commencer dans les semaines qui viennent. Si tout va bien, Topics devrait être opérationnel et déployé à la fin de 2022.