L’adoption de la taxe sur les géants du numérique, premier pilier de la grande réforme fiscale validée par l’OCDE fin 2021, patine. Les blocages des États-Unis, de l’Arabie saoudite et de l’Inde pourraient, selon Bruno Le Maire, pousser l’Union européenne à mettre en place sa propre taxe.
La grande révolution fiscale de fin 2021 aboutira-t-elle un jour ? Validée par l’OCDE fin 2021, elle s’appuie sur deux piliers. Le numéro 2, visant à imposer un taux d’imposition minimum de 15 % sur les bénéfices des entreprises réalisant plus de 750 millions de dollars de chiffre d’affaire annuel, partout dans le monde, progresse, et pourrait finir par être adopté par l’OCDE d’ici la fin de l’année.
Le pilier 2 de la réforme de l’OCDE en bonne voie, le pilier 1, sur les géants du numérique, en danger
En revanche, le premier pilier est en grand danger. Il consiste en une réaffectation par les multinationales d’une part de leur impôt sur les bénéfices aux pays « de marché », c’est-à-dire ceux où elles réalisent leurs activités. Il concerne les entreprises réalisant plus de 20 milliards de dollars de chiffre d’affaire, avec un taux de rentabilité supérieur à 10 %.
Ce pilier 1 toucherait en particulier les géants du numérique, notamment les GAFAM, spécialisés dans l’optimisation fiscale, notamment en choisissant habilement leurs sièges sociaux régionaux dans les États proposant le taux d’impôt le plus bas.
Bruno Le Maire pointe les blocages des USA, de l’Arabie saoudite et de l’Inde, et plaide pour adoption européenne
Mais l’adoption de ce pilier 1 par l’OCDE, prévue pour 2023, semble en bien mauvaise voie, comme le reconnaît l’un des grands défenseurs de cette mesure, le ministre français de l’Économie français, Bruno Le Maire. Durant un point presse, ce 20 février 2023, il admet ainsi : « aujourd’hui les choses sont bloquées, notamment par les États-Unis, l’Arabie Saoudite et l’Inde. Nous plaiderons pour un déblocage de la situation » mais « les chances de succès sont minces ».
Le ministre envisage donc de proposer, sur le sujet, un cavalier seul à l’Union européenne. « Je rappelle que nous avons toujours indiqué que si les pays du G20 et de l’OCDE n’étaient pas capables de se mettre d’accord pour une mise en œuvre pratique de la taxation digitale, nous plaiderions pour sa mise en œuvre européenne. Je pense que nous y sommes », affirme-t-il.
Il pointe aussi que la fameuse « taxe GAFAM » française rapporte 700 millions d’euros par an à la France. Et pourrait, pourquoi pas, être un modèle pour le législateur européen.