Les deux Toulousains qui avaient créé la plateforme de téléchargement illégal de contenus audiovisuels Zone-Telechargement ont été condamné, début avril 2023, à 18 mois de prison, dont 6 fermes, et à 50 000 euros d’amende. Le terme d’une odyssée judiciaire de plus de 6 années… que devrait prolonger l’appel probable des accusés.
Entre 2014 et 2016, Zone-Telechargement fut le numéro 1 des sites de téléchargement direct de contenus audiovisuels piratés en France. Le site, simple d’utilisation et proposant des liens fiables et de qualité, cumulait 3,7 millions de connexions par mois en 2016, en faisant le 11ème site le plus visité de l’Hexagone.
Arrêtés en 2016, les deux fondateurs de Zone-Telechargement se défendait de toute activité illégale
Mais une plainte de la SACEM et de l’Association de lutte contre la piraterie audiovisuelle avait mis les autorités sur la piste de la plateforme, dès 2014. Fin 2016, une opération de police conduit à son démantèlement et à l’arrestation de ses deux jeunes fondateurs, les toulousains Thibault Ferreira et Wilfrid Duval.
Les deux amis avaient respectivement 19 et 21 ans à la création de Zone-Telechargement, en 2012. Fin 2016, ils s’étaient d’ailleurs défendu de tout caractère illégal de leur plateforme, dans un tweet indiquant : « Zone-Telechargement n’est pas un hébergeur mais un site de partage avec des liens directs.. Hadopi ne nous concerne pas ».
Ils précisaient aussi, juste après leur arrestation : « notre système n’est pas illégal en soit puisque les lois ne proclament pas une peine pénale pour les partages ». De toute évidence, ni la police, ni les autorités judiciaires n’étaient de cet avis !
600 000 euros récoltés pour chacun des fondateurs, un manque à gagner de 75 millions pour les ayant-droits
Les deux amis sont alors mis en examen pour mis en examen pour « contrefaçon, blanchiment aggravé et travail dissimulé en bande organisée« , et passent quelques semaines en prison, avant d’être libérés, en mars 2017, sous bracelet électronique.
L’enquête de la gendarmerie et du centre de lutte contre les criminalités numériques estime que le site aura rapporté à Thibault Ferreira et Wilfrid Duval 600 000 € chacun entre 2014 et 2016. Leur arrestation a permis aux forces de l’ordre de saisir 450 000 €. La même enquête évalue à 75 millions d’euros le manque à gagner pour les ayant-droit des œuvres diffusés sur la plateforme.
18 mois de prison, dont 12 avec sursis, 50 000 euros d’amende
Il aura fallu plus de 6 années pour les voir répondre de leurs actes devant le tribunal correctionnel de Toulouse, le 13 mars 2023. La sentence est tombée début avril 2023 : les deux fondateurs de Zone-Telechargement sont condamnés à 18 mois de prison, dont 12 avec sursis, et 50 000 € d’amende.
Les trois mois de prison effectués entre fin 2016 et début 2017, ainsi que leur port longue durée du bracelet électronique les dispensent de toute nouvelle peine de prison. Pour autant, leur avocat, Me Simon Cohen, a annoncé son intention de faire appel de la décision et, en cas de nouvelle peine, de se pourvoir en cassation, « pour un certain nombre de questions fondamentales ».
« Pénaliser l’intelligence est une erreur », pour l’avocat des deux pirates
Au micro de France 3 Occitanie, ce même Me Simon Cohen fustigeait la condamnation, avec la même ligne de défense que le tweet de fin 2016, en pointant « une question juridique qui n’a pas été tranchée depuis le début de l’instruction : on a condamné le lien, mais pas la banque de données elle-même, alors qu’ils sont étrangers à la banque de données ».
Dit autrement : Zone-Telechargement n’a jamais hébergé le moindre contenu illégal, il se contentait de rediriger (plutôt bien) vers des liens de téléchargement direct, avec leurs propres systèmes de revenus, de publicités et d’abonnement.
« Ils sont passés pour les inventeurs et initiateurs d’un système de fraude. Ils ont bénéficié des failles du système : est-ce répréhensible ? Pénaliser l’intelligence est une erreur », ajoute même l’avocat de Thibault Ferreira et Wilfrid Duval.
Des clones qui repoussent comme des champignons…
Hors du contrôle de ses deux fondateurs, Zone-Telechargement a déjà ressuscité de nombreuses fois, dans des versions plus ou moins efficaces, plus ou moins légales (l’une d’entre elle renvoie ainsi vers les supports légitimes où l’œuvre est disponible), plus ou moins truffées de malwares.
L’année dernière, les autorités ont d’ailleurs fermé un nouveau clone, né sur les braises du premier confinement…