Le 29 décembre 2016, le Conseil Constitutionnel a annulé l’amendement Galut, qui visait l’évasion fiscale des entreprises numériques qui vendent des biens ou des servies sans être installées en France. Petite explication sur les raisons de cette invalidation.
Le budget 2017 prévoyait la mise en place d’une taxe visant les multinationales d’Internet pratiquant l’évasion fiscale : cette taxe avait été intégrée par un amendement du député PS Yann Galut, s’inspirant d’un impôt mis en place au Royaume-Uni depuis 2015 sur les « bénéfices détournés ».
Le principe était simple : étendre l’impôt sur les sociétés aux bénéfices réalisés en France par une personne morale établie hors de France. Yann Galut expliquait que « l’impôt sur les sociétés payé par Google en 2015 s’est élevé à 6,7 millions d’euros, pour un revenu estimé à plus de 1,5 milliard (en France, NDLR). Airbnb, dont le résultat est estimé à 65 millions d’euros, n’a payé que 69 000 euros d’impôt » – soit moins de 1 % d’impôt payé sur le sol français.
Moins de 1 % d’impôt pour les Géants du Web
Cette loi touche à un problème fondamental des administrations fiscales face à l’économie numérique : la dématérialisation des procédures de vente permet aux entreprises d’échapper à la notion d’établissement stable, en raison de l’absence de site physique sur le territoire où les ventes sont réalisées.
L’amendement de Yann Galut prévoyait de frapper les entreprises établies à l’étranger mais qui conduisent une activité de vente ou de prestation de service en France, et de viser leur bénéfices dès lors que cette activité « a pour objectif d’échapper à l’impôt qui serait dû en France ou d’atténuer son montant ». Cette loi aurait mis en place le principe d’une « présomption d’établissement stable en France », permettant de territorialiser les bénéfices effectuées sur le sol français.
L’administration ne peut pas choisir les contribuables soumis à l’impôt sur les sociétés
Mais ce régime était conditionné au régime de la vérification de comptabilité, si bien que seule une décision de l’administration pouvait appliquer cette « présomption » à une entreprise ou une autre, et ce après un contrôle. Et c’est bien ce détail qui a été jugé anticonstitutionnel : la mise en place (ou non) de ce contrôle, a été jugé discriminatoire – l’administration fiscale n’a pas « le pouvoir de choisir les contribuables qui doivent ou non entrer dans le champ d’application de l’impôt sur les sociétés ».
Pas de nouvelle loi avant les élections
Cela étant, le Conseil Constitutionnel a estimé que la loi était, à ce « détail » près, applicable : « Le législateur dispose de la faculté de modifier le champ d’application de l’impôt sur les sociétés, afin d’imposer les bénéfices réalisés en France par des entreprises établies hors du territoire national ».
Yann Galut a affirmé avec force que « une dois de plus, le Conseil constitutionnel choisit de censurer un texte contre l’évasion fiscale ». Il est motivé à modifier le texte pour le rendre applicable, mais n’aura pas le temps matériel de le faire avant l’élection présidentielle : c’est à la nouvelle Assemblée Nationale que reviendra la tâche de présenter un nouveau texte parfaitement constitutionnel.