L’archi-domination des batteries Lithium-Ion prendra-t-elle fin suite à une découverte française ? Une équipe du CNRS a en tout cas mis sur pied une batterie utilisant le sodium à la place du lithium, qui s’annonce plus rapide, plus efficace et moins chère. Trop beau pour être vrai ? Tiamat, une start-up créée pour l’occasion promet en tout cas une commercialisation pour 2020.
Retour en arrière : dans les années 1980, les batteries au sodium dominent le marché des accumulateurs électriques. Mais une nouvelle technologie, développée par des chercheurs européens, notamment français, fait son apparition : elle utilise le lithium, un métal rare, mais qui permet de développer une technologie de transfert d’ion particulièrement efficace.
Batteries Lithium-Ion : une création européenne développée… en Asie !
Cette technologie est récupérée par des constructeurs japonais et, en 1991, c’est Sony qui commercialise la première batterie Lithium-Ion. Au terme d’une impressionnante success-story, cette batterie domine aujourd’hui outrageusement le secteur, elle fournit la quasi-totalité des batteries miniaturisées pour smartphone ou ordinateurs portables, elle équipe tous les véhicules électriques et est également dominante dans le secteur du stockage de l’électricité.
Signe des temps : Tesla vient de construire la plus grande batterie Lithium-Ion du monde, en Australie-Méridionale. D’une puissance de 100 MW, elle a été achevée en un peu plus de deux mois – alors que le défi était de la construire en moins de 100 jours. Elle servira à soutenir le réseau électrique et les installations d’énergies renouvelables de l’Australie-Méridionale.
Mais, suite au transfert de technologie vers le Japon, l’Europe a totalement perdu pied dans la construction de cette batterie qu’elle avait pourtant inventé ; la France particulièrement n’a jamais produit la moindre batterie Lithium-Ion. Aujourd’hui 95% de la production vient d’Asie, le reste étant majoritairement d’origine américaine, et dû essentiellement à la seule volonté de Tesla.
Des batteries Sodium-Ion, moins chères, plus performantes
Aujourd’hui, l’histoire semble bégayer. La recherche fondamentale française a accouché d’un très joli bébé. Mais cette fois, pas question qu’il s’épanouisse loin de son berceau d’origine ! Une équipe du CNRS achève en effet le développement d’une batterie utilisant une technologie similaire au Lithium-Ion, mais en remplaçant le Lithium par du Sodium.
Premier avantage : le sodium est nettement plus abondant dans la croûte terrestre, il représente 2,6% de cette dernière, contre 0,06% de lithium, dont les réserves, limitées, sont concentrées dans une poignée de pays, Colombie, Chili, Bolivie ou Chine. Le sodium est plus accessible et moins cher que le lithium, dont le coût ne fera qu’augmenter dans les années à venir ; il est également plus simple à recycler.
Second avantage de la technologie Sodium-Ion : des batteries plus performantes sur certains aspects, notamment la durée de vie et la vitesse de charge, qui serait environ 10 fois supérieure.
Un déploiement industriel made in France dès 2020
Preuve que la leçon du lithium a été retenu, une start-up a été créée, à Amiens : nommée Tiamat, son objectif unique est de commercialiser, à l’horizon 2020, les premières batteries Sodium-Ion opérationnelles. L’idée est de conserver l’avance technologique acquise par les équipes françaises pour développer cette solution à l’échelle industrielle en Europe.
La start-up, issue du Réseau sur le stockage électrochimique de l’énergie (RS2E) porté par le CNRS, dispose déjà de prototypes fonctionnels de piles au format « 18650 », très répandu dans l’industrie. Elle pointe la force de sa technologie : « Tiamat se positionne sur la puissance et la continuité de service grâce à des batteries endurantes (plus de 10 ans d’espérance de vie contre 3-4 ans pour celles au lithium dans des conditions d’usage continu), des charges et des recharges dix fois plus rapides ».
Ces futures batteries n’équiperont pas, dans un premier temps, smartphones ou ordinateurs, car elles sont trop massives : mais sur les secteurs clés du véhicule électrique et du stockage de l’électricité, elles présentent a priori un avantage concurrentiel sérieux. Le marché des batteries devrait exploser d’ici 2020, et atteindre 80 milliards de dollars. Nul doute que Tiamat saura y trouver sa place. L’objectif est que l’industrialisation ait lieu en France, permettant au pays « de prétendre à un leadership dans les nouvelles solutions de stockage de l’énergie ». Un haute ambition, dont on espère qu’elle sera couronnée de succès.