La bataille s’annonce épique. Alors que la fameuse « Taxe GAFA » a été définitivement adoptée par le Parlement français (elle prévoit de taxer les géants du numérique à hauteur de 3% de leur chiffre d’affaire), le gouvernement américain a auditionné les principales entreprises concernées. Les réactions sont unanimes : ils trouvent tous la taxe injuste et discriminatoire.
Voilà qui promet une belle joute – et sans doute un sacré mal de crâne pour le président français Emmanuel Macron dans sa confrontation avec le président américain Donald Trump, lors du G7 qui se tient à Biarritz.
Taxe GAFA : 3% du chiffre d’affaire des géants du numérique
Les Etats-Unis, administration et grandes entreprises concernées, vont en effet présenter un front commun contre la fameuse « Taxe GAFA », adoptée définitivement le 25 juillet 2019 par la France. Pour rappel, il s’agit d’une taxe qui pèsera sur 3% du chiffre d’affaire des grandes entreprises du numérique.
En choisissant des critères précis pour qu’une entreprise soit concernée (un chiffre d’affaire d’au moins 750 millions d’euros annuel, dont au moins 25 millions en France), la taxe va viser une majorité de grands groupes américains.
Les Etats-Unis se sentent visés, et jugent la taxe discriminatoire
Même si quelques entreprises européennes (Booking, Zalando…), chinoises (Alibaba), japonaises (Rakuten) ou françaises (Criteo) seront également touchées, tous les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) sont dans le viseur de cette taxe, ainsi que la totalité des mastodontes américains du net (Airbnb, Groupon, Uber, Verizon, Tripadvisor…).
Dès lors, les Etats-Unis ont pu se sentir visé, jugeant la taxe discriminatoire. Surtout avec à leur tête un président toujours prompt à monter sur ses grands chevaux quand il s’agit de défendre l’économie américaine contre le reste du monde. D’autant que la taxe va s’appliquer sur le chiffre d’affaire 2019 de ces entreprises, un effet rétroactif très critiqué outre-Atlantique.
Pour Google, cette taxe « n’a pas de sens »
L’administration américaine a donc invité la plupart des géants du numérique à témoigner devant le bureau du représentant américain au Commerce et d’autres représentants du gouvernement. La levée de boucliers a été générale.
Nicholas Bamble, gestionnaire des relations publiques de Google, a notamment affirmé que cette taxe « touche une poignée d’entreprises liées à Internet alors que tous les secteurs sont devenus numériques ». Ne viser que les entreprise du net, c’est taxer une partie de l’industrie – ce qui, dans sa logique américaine, « n’a pas de sens ».
La CCIA veut que les USA réagissent de manière « agressive »
Amazon a critiqué un impôt qui peut s’apparenter à une « double peine ». Dans le cas d’un client français qui achète un produit à une entreprise espagnole, le produit serait taxé deux fois – en Espagne et en France. Le géant de l’e-commerce a déjà annoncé qu’il allait répercuter cet impôt sur ses partenaires, en augmentant notamment ses commissions.
De son coté, la CCIA (Association des industries de l’informatique et des communications), qui représente des sociétés comme Intel, eBay et Netflix, s’est montré encore plus offensive. Elle souhaite que les Etats-Unis répondent de manière « agressive » a une taxe qui vise essentiellement des entreprises américaines.
Question de paradigme : la France veut lutter contre l’optimisation fiscale…
L’ensemble de ces réactions prouvent le fossé existant entre la France et les Etats-Unis sur la façon de concevoir l’entreprise et la fiscalité. Car ce sont bien deux paradigmes qui s’opposent, la libre-entreprise contre une forme de contrôle étatique.
Certes, la taxe est conçue pour viser spécifiquement un certain type d’entreprises. Des entreprises dont la particularité est d’avoir une emprise mondiale, essentiellement par le biais d’Internet. Et qui, pour l’écrasante majorité des cas, pratiquent des optimisations fiscales oscillant entre l’arrangeant et le purement scandaleux. La plupart des entreprises concernées réalisent des profits en France, qui sont ensuite taxés dans des paradis fiscaux.
La taxe française est une réponse, imparfaite et temporaire, à cet état de fait, puisque le but est, à terme, de modifier les règles du jeu fiscal au niveau mondial pour pouvoir agir sur ces optimisations fiscales. En attendant, les Etats-Unis se sont trouvé un nouvel adversaire sur les questions fiscales. Bon courage à notre président pour faire face !