Pris dans la tourmente de la perte de valeur des crypto-actifs (cet « hiver crypto » qui se prolonge sans fin), la plateforme FTX est au bord du dépôt de bilan, surtout après le volte-face de Binance, son concurrent qui avait, un temps, proposé de la racheter.
L’écosystème des crypto-actifs est-il en train de s’effondrer, progressivement, comme un château de cartes, ou sommes-nous face à une crise de croissance qui fait tomber les plus fragiles avant une inévitable concentration du secteur ?
L’hiver crypto va-t-il emporter FTX comme un fétu de paille ?
Difficile à dire, car aucun business model et aucun écosystème ne ressemblent à celui des cryptomonnaie et des NFT, de part leur déconnexion de la finance classique, leur aspect décentralisé et libéré de toute régulation, et leur extrême volatilité.
Toujours est-il que cet « hiver crypto », la tempête qui dure depuis quelques mois, et qui a provoqué licenciements, faillites et fin du game pour certaines cryptomonnaies, est en train d’emporter la plateforme d’échange de crypto-actifs FTX.
La société est aux portes du dépôt de bilan, et son président-fondateur, Sam Bankman-Fried, le reconnaît, et assume ses responsabilités. « Profondément désolé d’en être arrivé là », il admet : « C’est ma faute, à moi et moi seul : je suis désolé, même si cela ne rend pas les choses plus faciles ».
8 milliards pour éviter la cessation de paiement
Pour sortir sa société de l’ornière, il aurait besoin à très court terme de 8 milliards de dollars, sous peine d’être en cessation de paiement, et devoir mettre la clé sous la porte. Pour éviter ce sort à FTX, il explorerait toutes les possibilités, emprunts (mais quelle banque serait assez folle pour se mettre dans une tel guêpier?) ou cession.
Il a proposé à son concurrent Coinbase de le racheter, mais le groupe a décliné. Avec Binance, numéro 1 des plateformes crypto dans le monde, la donne a failli être différente.
Binance retire son offre de rachat
Le plateforme a sérieusement envisagé de racheter FTX. Elle a même rendue publique une offre. Mais, 48 heures seulement après cette annonce, Binance a renoncé à ce projet de sauvetage.
« En conséquence de notre audit et des dernières informations de presse relatives à une mauvaise gestion des fonds de ses clients ainsi qu’à des enquêtes menées par les pouvoirs publics américains, nous avons décidé de ne pas poursuivre le projet d’acquisition de FTX », a indiqué le groupe, dans un communiqué.
Montages financiers baroques
Pourtant championne de l’opacité (personne ne sait exactement où est situé son siège social), Binance a reculé devant le marasme des comptes et des casseroles de FTX. La Securities and Exchange Commission (SEC), l’autorité des marchés financiers américaine, et la Commodity Futures Trading Commission (CFTC), le gendarme boursier américain, enquêtent en effet sur la plateforme.
Les deux agences tentent d’y voir clair dans les montages financiers complexes liant trois sociétés fondées par Sam Bankman-Fried, FTX, FTX US (une société distincte de la plateforme) et Alameda Research, une société d’investissement dans les crypto-monnaies, market maker de la plateforme FTX, qui contrôle par exemple 10 % de la monnaie Solana.
Désastre imminent
Les signes d’un désastre imminent se multiplient. Le site d’Alameda Research a été mis hors ligne. Sequoia Capital, l’un des fonds ayant le plus investi dans la plateforme, a réduit à zéro dans ses comptes la valeur de son investissement dans FTX et FTX US, qui s’élevait à 150 millions de dollars, en raison des risques de solvabilité de l’entreprise.
Ces annonces ont eu un effet direct sur les cours du bitcoin, qui a plongé un temps sous les 16 000 dollars, pour la première fois depuis deux ans, et, plus encore, sur les crypto-monnaies les plus liés à la galaxie Sam Bankman-Fried, à commencer par Solana, qui a dévissé de 30 % de sa valeur.
Mais le plus dur, c’est pas la chute, c’est l’atterrissage.